De nouvelles pistes pour la formation des élus locaux
En juillet 2019, Muriel Pénicaud, ministre du Travail, et Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales, ont confié à l'Inspection générale de l'administration et à l'Inspection générale des affaires sociales, une mission conjointe pour réaliser un audit de la formation des élus locaux et proposer des pistes d’amélioration.
Remis par les deux inspections générales en janvier 2020, à quelques semaines des élections municipales, le rapport prolonge les conclusions de travaux menés par la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat dans un autre document relatif de septembre 2018 aux conditions d’exercice des mandats locaux.
Le diagnostic des deux inspections est assez sévère : la formation des 550 000 élus locaux français est demeurée embryonnaire, malgré des dispositifs législatifs toujours plus incitatifs. Si le cadre législatif existant a favorisé la structuration d’un véritable marché de la formation des élus par les commandes des collectivités (le dispositif « historique ») et — plus directement — grâce au droit individuel à la formation des élus (DIFE), dans la pratique, seule une minorité de ces élus suit de telles formations.
Le rapport note que ce régime de formation des élus locaux est inéquitable : le niveau de dépense par élu est d’autant plus faible que la collectivité est petite et dotée de services modestes pour assister les élus.
Plusieurs fragilités exposent le système actuel à des risques considérés comme importants : le dispositif de gestion et de régulation n'est satisfaisant ni pour les bénéficiaires ni pour les autorités publiques, au point que les inspections estiment qu’il en résulte une absence de pilotage, mais aussi de contrôle.
Le constat est que seul un taux de recours extrêmement faible permet de préserver la soutenabilité budgétaire du régime de formation : alors que le dispositif historique demeure sous-employé, le DIFE est menacé par une impasse budgétaire dès sa première année de fonctionnement normal.
De ce fait, plusieurs dérives affectent la formation des élus, notamment l’absence d’encadrement des tarifs et de mesure de la qualité des prestations, des financements irréguliers. Au total, un déficit de transparence ne permet pas le fonctionnement satisfaisant du marché.
Pour améliorer le dispositif, les auteurs du rapport indiquent que la formation des élus locaux devrait s’inscrire dans le cadre d'un accompagnement à la fois global et différencié de l'élu dans l'exercice de ses fonctions. Une information généralisée de tous les élus au début du mandat devrait être complétée par des formations complémentaires pour les maires et élus titulaires d’une délégation. En cours de mandat, ils préconisent une meilleure valorisation des compétences, aptitudes et connaissances acquises.
Les treize recommandations formulées par les inspections s’organisent autour de cinq axes :
- unifier et articuler les droits à la formation des élus avec les droits acquis tout au long de la vie, notamment par la création d'un compte de formation de l'élu local (CFEL) ;
- concevoir un dispositif plus redistributif et budgétairement soutenable avec la création d'un fonds national de formation des élus locaux (FNFEL) ;
- mettre en place des procédures simplifiées et des évaluations transparentes ;
- introduire des garanties de rigueur et de qualité (procédure de déclaration d'activité alignée sur le droit commun des organismes de formation, certification de ces derniers, encadrement de la sous-traitance) ;
- organiser une gouvernance renforcée et plus transparente, principalement par un pilotage global du ministère chargé des collectivités territoriales et une gestion centralisée par la Caisse des dépôts et consignations.
Pour éviter un phénomène de saturation, la mise en place (par ordonnance) de ces préconisations devrait se faire de manière progressive avec deux années de préparation après l'intervention de cette ordonnance.